« Un sujet, un verbe, un complément. Et pour les adjectifs, vous viendrez me voir. » On raconte que Clemenceau, du temps où il était directeur politique de l’Aurore, donnait ce conseil aux journalistes débutants. On lui doit d’ailleurs le titre de l’article de presse le plus connu de l’histoire de France : « J’accuse ! ».

Pour certains, cet objectif de simplicité rassure. Ils pensaient qu’un écrit pro devait donner dans l’administratif, l’alambiqué, le fleuri – une langue étrangère en somme. Et voilà qu’il suffit de phrases courtes et de mots simples : alléluia ! J’ai rencontré en formation un chef d’équipe de collecte des ordures paralysé de devoir rédiger des « rapports de collecte ». De fait, sa production écrite était plutôt confuse. « Si vous devez prendre une baguette et que la boulangerie est fermée, vous savez écrire un SMS pour prévenir à votre femme ?» lui ai-je demandé. « Bien sûr ! » a-t-il répondu, surpris. « Le rapport qu’on attend de vous, c’est la même chose que ce SMS : un camion de déménagement bloquait la rue X. Nous n’avons pas pu collecter ce matin. » Je revois encore le soulagement sur son visage.

Pour d’autres au contraire, cette exigence de simplicité stylistique est frustrante. Surtout s’ils sortent de longues études et ont appris à manier l’art de la dissertation. Certains futurs inspecteurs de l’Urssaf sont déçus de devoir s’adresser aux cotisants avec un style aussi basique. Je les comprends, bien sûr. Mais la priorité numéro 1 d’un écrit professionnel est d’être compris… et lu. Cela ne va jamais de soi, a fortiori quand le sujet est aride et le destinataire non spécialiste. Le style doit donc, avant tout, viser la simplicité.

Phrases courtes, mots courts

 La première règle, à cet effet, est de rédiger des phrases courtes. La charte du patient hospitalisé, rédigée par le ministère de la Santé, est exemplaire sur ce point. « La personne hospitalisée est traitée avec égards », proclame l’article 8. Spontanément, on écrit plutôt des choses du genre « L’ensemble du personnel s’engage à mettre tout en œuvre pour traiter toutes les personnes hospitalisées avec le maximum d’égards. » Plus long, plus complexe, moins percutant. Les phrases trop longues sont le défaut stylistique le plus répandu, de loin. Et aussi le plus facile à régler quand on en a pris conscience. Deux options : enlevez les mots inutiles (il y en a toujours), ou coupez votre phrase en deux.

Des linguistes ont démontré que la longueur des mots jouait aussi pour faciliter la lecture. Comparez les deux phrases suivantes. « La diminution de la longueur des mots est un paramètre déterminant de  compréhension pour le destinataire. » « Un texte avec des mots courts est plus simple à comprendre. La différence est frappante, non ? Pour évaluer la facilité de compréhension de vos textes, des linguistes ont même conçu des indices de lisibilité, consultables dans certaines versions de Word. Tous reposent sur la longueur des phrases et des mots.

C’est au moment de la relecture, et non de la rédaction du brouillon, que ces corrections doivent être faites. Rien de compliqué, encore une fois ! Plus vous vous corrigerez, plus la simplicité deviendra un réflexe. Et si vous avez envie d’une expression plus créative et personnelle, explorez d’autres territoires d’écriture !

Des réclamations, j’en écris beaucoup. Retard de livraison, produit périmé, valise égarée : tout est bon à prendre. Non que je sois plus grincheuse qu’une autre mais c’est un excellent moyen de récupérer du matériau pour mes formations à la relation client. Et parfois de m’amuser. Les mails et courriers adressés au client valent parfois les perles du bac. Pas étonnant, quand on demande à des téléopérateurs de rédiger des mails, sans aucune formation. N’empêche : quand une entreprise envoie un mail incompréhensible, truffé de fautes et en majuscules, ça fait mal à l’image de marque.

Un écrit bâclé peut faire perdre un marché

Dans un autre registre, les réponses aux appels d’offres sont parfois tout aussi bâclées : là aussi, les conséquences sont lourdes. Terminées dans la précipitation, les propositions commerciales et autres mémoires techniques regorgent souvent d’énormités. Phrases incohérentes, coquilles à répétition, parties notoirement bâclées (je constate avec tristesse que la section « Développement durable » est souvent la plus maltraitée), erreurs dans le nom du prospect. Quand on pense à l’enjeu financier et à la charge de travail que constitue un tel projet, cette négligence rédactionnelle paraît tout simplement suicidaire.

 

Vos écrits vous représentent

Ce qui est vrai pour l’image de votre entreprise vaut aussi pour votre image personnelle. Si vous envoyez des mails incompréhensibles ou maladroits (et donc perçus comme agressifs), vous passerez pour incompétent et / ou désagréable. Que cela vous plaise ou non, vous êtes jugé sur vos écrits, a fortiori par ceux qui en vous connaissent pas. Je me souviens d’un interlocuteur administratif que j’avais pris en grippe  tant ses messages étaient secs et méprisants. Un jour, je l’ai appelé pour régler une difficulté… et j’ai découvert une personne charmante, serviable et pleine d’humour. Bref, à l’opposé de ce que laissaient transparaître ses écrits. Dommage !

Tout récemment, pendant le confinement, un professeur d’école de communication (ça ne s’invente pas !) a envoyé à son étudiant l’appréciation suivante : « Votre texte est long et moche. Dramatique ou catastrophique : au choix ! » Le voilà catalogué définitivement comme un sale type… alors qu’il a peut-être juste voulu faire son malin. Mauvaise idée ! Quelques conseils, donc, pour préserver votre image.

Politesse : mieux vaut trop que pas assez !

En matière de courtoisie, mieux vaut trop que pas assez. On ne vous reprochera pas d’écrire « bonjour » deux fois dans la même journée. A l’inverse, un collègue fatigué et stressé oubliera peut-être, à 18h, que vous lui avez écrit une première fois à 9h.

Dans le même esprit, évitez l’excès de familiarité… notamment avec la hiérarchie. Le « Coucou Jean-Louis » ou « Hello Anne » ne plaira pas forcément au PDG, même si la culture d’entreprise prône une familiarité factice.

Avec vos collègues proches, en revanche, vous pouvez bien sûr adopter un style plus  détendu. C’est même nécessaire : un « cordialement » à votre voisin de bureau sera perçu comme glacial. D’où l’importance de distinguer courtoisie et formalisme. A un collègue proche, vous pouvez donner du « Salut », « Bon week-end » ou, pourquoi pas, « A plus » ou « Ciao ». En revanche, abstenez-vous de lui écrire comme à un chien (je sais, on écrit rarement à un chien).

Enfin, faites attention au « merci  de » et « s’il vous plaît ». Les « mots magiques » ont parfois, à l’écrit, l’effet curieux de donner un ton sec. « Pourrais-tu s’il te plaît me mettre en copie de ces commandes » est plus agacé et directif qu’un simple « Pourrais-tu me mettre en copie de ces commandes ? ».

Ces bonnes pratiques simples éviteront bien des incompréhensions. Faute de ton et de langage non verbal, il y a souvent un écart entre l’intention du rédacteur et la perception du destinataire. Puisque l’écrit nous rend susceptibles, soyons attentionnés !

En entrant sur le terrain, mieux vaut connaitre les règles du jeu : cela vaut aussi pour la prise de parole en public. Avec ou sans veste ? Baskets ou talons ? Debout ou assis ? Micro ou pas ? Sans oublier de prévoir la petite blague obligatoire, si le public est anglosaxon – cela fait partie des attentes standards. En général, ce repérage sert à éviter les fausses notes. Mais attention : si les codes de l’exercice ne vous conviennent pas, vous avez le droit de les bousculer.

 Ne pas hésiter à changer les règles du jeu 

Prenons le cas où vous êtes le dernier à intervenir dans une longue journée de séminaire. Projeter une présentation Powerpoint, comme les 10 orateurs précédents, risque de faire suffoquer d’ennui votre auditoire. Mieux vaut donc imaginer un autre format : quizz, questions-réponses… Vous pouvez aussi innover dans le but de marquer les esprits. Un exemple saisissant est le discours prononcé à la remise des diplômes HEC de 2016 par le patron de Danone, consacré principalement à ses souvenirs de son frère schizophrène. On peut aimer ou pas. Mais ce discours-là restera dans les annales.

Enfin, mieux vaut changer les règles du jeu si l’exercice, tel qu’il est prévu, est voué à l’échec. Si vous voulez capter l’attention de gens « de terrain », ne les enfermez pas dans une salle pendant huit heures. Il vaudrait sûrement mieux couper la journée avec une visite de site. Ou, a minima, proscrire le plateau-repas avalé sans mettre le nez dehors.

Quand on est pris dans la routine ou dans l’urgence, on ne s’autorise pas assez à faire autrement. Un jour de printemps, au retour de la cantine, un stagiaire en formation a fait remarquer qu’on aurait presque pu s’installer dehors. J’ai approuvé la boutade d’un sourire. Puis me suis demandée ce qui nous en empêchait. Cet après-midi de travail sur la pelouse est un excellent souvenir, pour tout le monde, je pense.

Enfin, mieux vaut bousculer les modalités quand ces dernières vous angoissent. Si la perspective de parler seul à 300 personnes vous ôte le sommeil, pourquoi ne pas envisager une présentation à deux voix. Pour convaincre votre chef, dites-lui que cela donnera plus de rythme et de vie à votre intervention. En plus, c’est vrai !

Bref, pour le bien de l’auditoire et pour le vôtre, soyez créatifs !

La prise de parole en public est parfois un exercice imposé : une tâche supplémentaire qui vous tombe sur le coin du nez, bref, une corvée. Quand bien même ce serait le cas, autant en tirer le meilleur parti. Pour cela, rien de tel que de prendre un peu de hauteur et d’assigner à l’exercice un objectif personnel. Quel est, pour vous, le but de l’opération ? Convaincre ? Nouer de bonnes relations avec l’auditoire ? Lever des craintes ? Valoriser le travail d’une équipe ? Motiver les troupes ? Emporter une décision ? Ou encore (c’est le moment ou jamais) vous distinguer ?

La question n’a rien de théorique. Au contraire, elle doit guider votre préparation sur le fond et sur la forme. Si votre objectif, par exemple, est de motiver une équipe sur un nouveau système déjà mis en place ailleurs, le témoignage de pairs aura plus d’impact que votre seule parole de chef de projet. Si vous souhaitez avant tout créer de bonnes relations au sein d’une équipe projet en démarrage, la qualité des échanges et la convivialité devront primer sur la quantité d’informations transmises. Enfin, si votre objectif numéro 1 est de rapprocher le siège du « terrain », évitez de parler comme un énarque.

Non seulement un objectif clair vous aide à définir vos priorités, mais il vous épargne des frustrations. J’ai rencontré en formation une jeune ingénieure qui, après avoir présenté les projets d’aménagement en réunion publique, se sentait toujours en échec. Et pour cause ! Son but était de convaincre tous les habitants en deux heures que l’installation d’une déchetterie dans leur commune était une bonne nouvelle : mission impossible. Elle a finalement pris conscience que, face à des opposants dogmatiques et virulents, l’objectif devait être, plus modestement, de les canaliser et d’éviter qu’ils ne monopolisent la parole – pour permettre d’autres échanges plus constructifs. Ce changement de regard lui a permis d’être plus détendue et plus motivée.

Enfin, un objectif clair vous donnera des ailes pour préparer votre intervention, et pour vous exprimer le jour J. Si vos vingt minutes sur l’estrade vous épargnent des heures de réunion laborieuse, votre investissement est amorti. L’épreuve prend alors un sens et n’en est plus tout à fait une.

L’écriture au travail est un enjeu majeur, et généralement négligé, de bien-être au travail. Pour de multiples raisons.

L’écriture, source de stress

Ecrire, c’est s’exposer au regard de l’autre. Autant certains avouent volontiers être nuls en maths (quitte à en faire un curieux objet de fierté), autant il est douloureux d’afficher des difficultés à rédiger. Pour certains, l’écriture est source de complexes et de stress – le manque de tact de certains managers, armés d’un stylo rouge ou du mode Corrections de Word, ravive de douloureux souvenirs scolaires. Aider ces personnes à reprendre confiance est, pour moi, l’un des aspects les plus gratifiants de la formation à l’écriture.

Attention aux mails mal maîtrisés !

L’omniprésence du mail est un autre facteur qui fait de l’écriture un enjeu majeur de bien-être au travail. Le mauvais usage de cet outil de communication a un impact désastreux sur les équipes et les individus. D’abord du fait de la perte de temps et de la frustration  générées par les messages inutiles ou peu clairs. Ensuite parce que les maladresses de rédaction nuisent à la coopération et l’ambiance de travail. Certaines pratiques, comme de mettre la hiérarchie en copie ou de ne pas se relire, ont  pour effet de monter en épingle des incompréhensions mineures. Ces écueils concernent tous les salariés, y compris Les métiers techniques désormais contraints à produire des écrits chaque jour.

Quant à la culture de la trace écrite systématique, parfois obsessionnelle, elle crée d’invraisemblables lourdeurs administratives et des climats paranoïaques. Après tout, si vous instaurez la traçabilité pour toute demande, qu’est-ce que cela signifie ? Premièrement, vous prévoyez que votre interlocuteur ne fera pas son boulot, deuxièmement, vous imaginez qu’il niera avoir reçu votre demande. Autrement dit, vous considérez vos collègues, par défaut, comme des guignols et de menteurs! Avec un tel fonctionnement, tout le teambuilding du monde aura du mal à recoller les morceaux… Plutôt que de brasser ensemble des hectolitres de bière (pas si bonne que ça), de fabriquer des tonnes de macarons ou de vous ruiner en escape games, essayez de limiter l’usage du mail dans votre équipe. Vous économiserez de l’argent au lieu d’en dépenser, réduirez votre empreinte carbone et allégerez les tensions, frustrations et suspicions. Accessoirement, la productivité fera un bond. Comme l’a montré Google dans sa fameuse étude Aristote, les équipes performantes se distinguent avant tout par un climat de sécurité psychologique. La traçabilité obsessionnelle n’encourage pas la sécurité mais la peur.

Lien entre mails et burn-out

Comme si cela ne suffisait pas, le mail professionnel a aussi tendance à envahir notre sphère privée. Bien souvent, le droit à la déconnexion reste lettre morte – excès de pression, addiction ou manque d’autodiscipline. Or l’absence de frontière entre vie professionnelle et vie priée a un lien étroit, évident et démontré avec le burn-out

En somme, un meilleur usage du mail améliorera votre humeur, votre santé, votre moral, et ceux de votre équipe! L’écriture au travail, finalement, ce n’est pas tout à fait un détail.

Pour ceux qui n’ont pas assisté au Webinaire sur le mail que j’ai eu le plaisir d’animer pour Incenteev le 7 janvier, voici le lien. Vous y trouverez des conseils pratiques pour bien utiliser le mail et rédiger des messages clairs, efficaces et respectueux. A la clé, une amélioration de la productivité, de l’ambiance et du bien-être au travail.

L’écriture est souvent vue comme un don, au travail et ailleurs. Si la fée ne s’est pas penchée sur votre berceau, vous voilà condamné à une production laborieuse et médiocre, là où d’autres chanceux produisent des textes lumineux avec une insolente facilité. Erreur. Comme le disait Queneau, « C’est en écrivant qu’on devient écriveron ». Autrement dit, l’écriture est affaire de pratique. Et, plus encore, affaire de méthode. Voici donc quelques conseils.

Avant : prenez le temps de réfléchir !

Sauf dans un journal intime, on écrit toujours à un ou plusieurs destinataires. Pour être lu et compris, il serait bon de penser à eux ! Que savent-ils déjà ? Qu’attendent-ils ? Qu’est-ce qui les concerne ? Si vous ne savez rien d’eux, renseignez-vous. Si la commande n’est pas claire, demandez des précisions.

Et vous, quel est votre objectif ? Convaincre ? Éclairer une décision ? Enclencher une action ? Rassurer ? Quels sont vos messages-clés ? Dans quel ordre les présenter ? Que voulez-vous que vos lecteurs retiennent, et, le cas échéant, fassent ? Tout cela n’a rien d’original mais soyons honnêtes : cette réflexion préalable passe souvent à l’as.

 

Pendant : ne vous jugez pas !

Avec des fondations solides, le risque de page blanche est moindre. Si vous peinez à démarrer, malgré tout, quelques astuces peuvent débloquer la situation. Rédigez d’abord la partie la plus facile, imaginez que le destinataire est en face de vous et que vous lui parlez … ou reportez l’écriture à un moment plus favorable. Pensez aussi à réunir les conditions matérielles propices à la concentration : alertes désactivées, environnement calme.

Une fois lancé dans l’écriture, rédigez sans trop vous poser de questions. Comme le rappelle l’écrivain Eric Chevillard : « Quand j’écris, je m’expose à mon insatisfaction chronique. Cette voix perfide et sarcastique qui s’élève tout de suite pour se moquer (…), il faut lui tordre le cou, à ce corbeau, si l’on veut écrire. » De fait, si vous jugez la qualité de votre production au fur et à mesure, vous n’avancerez pas.

Un dernier point, dans cette phase de rédaction : attention au copié-collé ! Cette manip peut aider à démarrer et faire gagner du temps. Ou, à l’inverse, en faire perdre si le texte d’origine est trop éloigné de ce que vous devez produire – ou trop mal écrit. Sans oublier le risque de relire trop vite la partie copiée, et d’aboutir à des incohérences ou un résultat décousu.

Après : relisez-vous !

Une page du manuscrit de L’éducation sentimentale, Source : BNF

Si votre V1 est d’une orthographe incertaine ou d’un style pataud, aucune importance : personne n’en saura rien ! Maintenant qu’elle est terminée, vous pouvez la peaufiner à loisir. Pour être efficace, votre relecture doit respecter quelques règles. Laissez reposer votre texte, relisez-le sur papier ou même à voix haute. N’hésitez pas à repasser plusieurs fois, avec des objectifs différents (fluidité du style, orthographe, absence de jargon…). Si les enjeux sont importants, faites relire à une personne de confiance, au regard extérieur irremplaçable. Vous n’êtes pas obligé de faire comme Flaubert, qui a réécrit certaines pages des dizaines de fois. Mais la relecture attentive fait partie intégrante de l’écriture. Et est indispensable pour un bon résultat !

 

Contrairement à tant d’autres catastrophes, une prise de parole en public s’abat rarement sur vous à l’improviste. Il peut arriver qu’on vous demande un show au pied levé mais la plupart des colloques, séminaires, et autres présentations au Codir ou au Comex se planifient longtemps à l’avance. Ce qui vous permet de travailler votre propos et de répéter – répéter une intervention de dix minutes ne prend jamais que … dix minutes. Arriver le jour J préparé, content et confiant : voilà l’anti-stress numéro 1. De même, vous éviterez les grains de sables angoissants avec un peu d’organisation – apporter mouchoirs en papier, bouteille d’eau, collant de rechange, double sauvegarde de vos visuels, etc.

 

Exercices respiratoires : bon pour la voix, bon pour le stress

Au-delà de cette préparation soignée, comment réduire le stress ? Les exercices respiratoires en tout genre, familiers aux adeptes du yoga et de la méditation, aident à réduire l’angoisse et libérer la voix – parfois nouée ou tremblante. Parmi les innombrables possibilités, la technique du 4-7-8 a le mérite d’être facile et de pouvoir se pratiquer n’importe où. Bien évidemment, plus vous pratiquez ce exercice (ou d’autres), plus il sera bénéfique.

Il existe d’autres trucs pour se relaxer – plus ou moins efficaces selon les personnes : à vous de tester. La première consiste à aller discuter avec des personnes de l’assemblée avant de commencer, si les modalités le permettent. Ainsi, le contact sera établi et vous aurez moins l’impression de « rentrer dans l’arène ». Dans le même registre, vous pouvez demander à des collègues appréciés de s’asseoir à l’avant, pour vous réchauffer à leur sourire. Vous pouvez aussi, pour relativiser l’enjeu, regarder une photo de vos enfants (ou de votre chien) : après tout, cette intervention est-elle si importante ? Une autre option, si le stress vous envahit pendant les premières secondes, est de le reconnaître, tout simplement. Avouer que l’exercice vous impressionne vous attirera généralement la sympathie, et vous aidera à démarrer.

 

Vive les grigris !

Enfin, n’hésitez pas, comme de nombreux comédiens ou sportifs, à recourir aux porte-bonheur et grigris en tout genre – personne n’en saura rien. Vous pouvez par exemple porter un foulard ou un costume que vous associez à de bons souvenirs. Ou même, comme Michael Jordan, Basile Boli ou Colin Farrell s’en ouvrent avec une candeur désarmante, miser sur la présence réconfortante de votre caleçon / slip / string fétiche. Un psychanalyste y trouverait peut-être à redire, mais ça, on s’en fiche.

Une fausse information qui fait des ravages

Avez-vous entendu dire que, dans la communication orale, 7% seulement du message passe par les mots alors que la voix compte pour 38% et le langage corporel pour 55% ? Je vous l’accorde, c’est moins grave que de croire que la terre est plate. N’empêche que cette fausse information sur la communication orale, colportée dans certains ouvrages spécialisés, fait des ravages.

En réalité, ces chiffres, dus aux travaux du psychologue américain Albert Mehrabian, ont été sortis de leur contexte et interprétés de façon absurde – Ted Anderson, directeur de Tedx, l’explique très bien dans son livre Parler en public. En réalité, les études de Mehrabian portaient exclusivement sur l’expression des sentiments : si vous dites « C’est bien ! » avec des gestes agressifs, votre interlocuteur n’y croira pas – on s’en doutait un peu. Donc, non, le langage non-verbal et la voix ne priment pas sur le reste : dans mes formations, je fais d’ailleurs le choix d’insister aussi sur la préparation du contenu.

Notre visage et notre corps parlent

Bien sûr, il est vrai que notre visage et notre corps parlent. On a tous vu cent fois la scène du suspect scruté à travers une glace sans tain. Et on se souvient de l’interview du malheureux Clinton après la malheureuse affaire Monica Lewinsky : les experts en communication ont compté qu’il s’était touché le nez 26 fois ! Par un phénomène inconscient autant qu’étrange, il paraît en effet qu’on se touche le nez quand on ment. Mais, a priori, vous n’avez pas à proférer de mensonge aussi énorme que l’ancien président des Etats-Unis. Et, si c’est le cas, vous n’aurez pas un bataillon d’experts pour visionner à l’infini votre prestation et scruter, interpréter, décompter, décrypter, commenter avec acharnement chacun de vos gestes.

Vous ne me croyez pas ? Regardez des extraits de conférences Ted sans le son : vous verrez que les gestes « parasites », comme tripoter ses boucles d’oreille ou ses lunettes, ou encore se « savonner » les mains ou croiser les bras, ne manquent pas. Au passage, amusez-vous à deviner la nationalité des intervenants. Vous verrez que le langage non verbal a aussi une forte dimension culturelle. En réalité, les règles à suivre sur le langage non verbal sont peu nombreuses – mais pas si faciles à appliquer.

Tout d’abord, le regard. Indispensable pour établir un échange avec votre auditoire : nécessité absolue, donc. En évitant le style « arrosage automatique », où l’on balaye l’assemblée sans jamais s’arrêter sur personne. Ensuite, le sourire. Il n’est pas forcément spontané quand on est stressé, mais forcez-vous un peu : l’auditoire n’y verra que du feu ! Mieux encore, la plupart des gens vous rendront votre sourire : vous voilà maintenant chargé de bonnes ondes. Maintenant, la posture. Objectif : se tenir droit et bien ancré dans le sol – on a parfois tendance à se tortiller ou danser d’un pied sur l’autre. Enfin, les gestes. Si vos bras vous encombrent, dans les premières secondes, il y a des astuces à tester : tenir un cahier ou un stylo (qui ne clique pas !), poser la main sur une table ou un pupitre. En général, quand on est lancé, les bras se libèrent et tout devient facile.

Rien de sorcier, vous voyez : il suffit d’un peu d’entraînement !

Prendre la parole en public est source de stress pour beaucoup : il n’existe pas de baguette magique pour l’éliminer. On raconte que la comédienne Sarah Bernard a répondu à une débutante, fière de n’avoir jamais le trac : « Ne vous inquiétez pas, ça viendra avec le talent ! ».
N’empêche : l’un des objectifs de la formation est de gagner en confiance. Avant même les techniques et astuces anti-stress à tester (j’y reviendrai), le premier moyen de se détendre est de se débarrasser de certaines idées reçues.

Idée reçue n°1 : mon stress se voit comme le nez au milieu de la figure

En formation, la plupart des participants redoutent l’épreuve de la caméra. Et sont pourtant agréablement surpris quand ils se voient à l’écran. Pourquoi ? Parce qu’ils prennent conscience, avec soulagement, de l’écart entre leur ressenti et l’image qu’ils donnent. Certains se sont sentis envahis par l’angoisse et se découvrent, tout ébahis, un air serein. Non, nous ne sommes pas transparents. Non, l’auditoire ne lit pas en nous comme dans un livre ouvert.

Idée reçue n°2 : je dois faire un sans-faute

Être attentif au choix des mots, au débit ni trop lent ni trop rapide, à la voix assurée sans être péremptoire, au regard tourné vers l’assistance, aux gestes ouverts et dynamiques, au sourire naturel, aux tics verbaux à éviter et à l’ancrage dans le sol … tout ça, bien entendu, en ayant soin de rester vous-même ! Si l’on voulait cocher toutes les cases, il faudrait non pas deux jours de formation mais plutôt deux semaines, ou peut-être deux ans, ou deux vies. Sauf que ces points ne sont pas d’importance égale – j’y reviendrai. Et, si vous n’êtes pas un professionnel de la communication ou du spectacle, personne, hormis vous-même peut-être, n’attend de vous la perfection. Vous en doutez ? Regardez au hasard quelques conférences TED. Vous verrez que tous ces gens passionnés, qui ont répété leur show avec un coach éminent, commettent un tas « d’erreurs » – ou plutôt d’imperfections – auxquelles on ne prête aucune attention. Pourquoi ? Parce qu’on est trop occupé à les écouter avec intérêt : après tout, c’est ce qui compte !

Idée reçue n°3 : il y a un modèle à suivre

Un seul conseil pour vous convaincre qu’il n’existe pas de modèle unique, ouvrez vos yeux et vos oreilles ! Journalistes, hommes et femmes politiques, dirigeants d’entreprise : parmi les orateurs les plus doués pour capter l’attention, on trouve tous les styles. Certains maîtrisent brillamment l’art de la pause, d’autres ont la passion volubile ; certains parlent avec les mains, d’autres sont statiques ; certains vous communiquent leur énergie, d’autres vous donnent l’impression envoûtante de murmurer à votre oreille. Prendre la parole en public, cela consiste à préparer un contenu percutant et adapté à ses destinataires, s’approprier quelques règles, s’entraîner. Mais ce n’est pas, jamais, singer tel ou tel, ou plaquer une gestuelle qui ne vous serait pas naturelle.